Les faits - Le Pr Vallancien est l'un des grands spécialistes de l'urologie et l'un des pionniers de la chirurgie coelioscopique et robotique de la prostate. A 69 ans, il enseigne à l'université Paris Descartes, est membre des académies nationales de médecine et de chirurgie et préside la Convention on health analysis and management (Cham). Son nouveau livre paraît vendredi chez Gallimard (19,50€).
Le stéthoscope de Laennec était la première étape. Le professeur Guy Vallancien prédit l’ère de la « média-médecine », celle où patient et médecin seront chacun à un bout d’une chaîne. Entre eux, de multiples intermédiaires : nouveaux métiers médicaux, robots, imagerie, analyses biologiques industrialisées, statistiques décortiquées, applis connectées… Un bouleversement que l’urologue anticipe avec confiance et même impatience, car il permettra une réorganisation de tout notre système de santé. A condition de dépasser le « climat d’anti-science » qu’il dénonce d’une plume vigoureuse dans son nouveau livre, La médecine sans médecins ? Le numérique au service du malade.
Commentaire:
Les outils de la médecine se transforment avec la technologie disponible. Ceci est attendu, souhaité, rassurant mais ce qui est plus disruptif c'est la fin de la Médecine par les hommes... Là c'est plutôt le scepticisme la crainte et parfois le refus. Et pourtant.
Vous annoncez la fin du « médecin à tout faire ». Qu’est-ce que cela veut dire ?
Aujourd’hui, le médecin fait tout à la fois, du certificat d’aptitude au sport à l’indication de traitement la plus compliquée, de l’arrêt de travail à une multitude d’examens cliniques et techniques… Une grande partie de ses tâches pourrait être transférée à d’autres professionnels médicaux, formés à un niveau master : nurse endoscopists comme en Grande-Bretagne, ingénieurs opérateurs pour piloter des robots chirurgiens, assistants médicaux pour vérifier la vue… Cela lui dégagerait du temps pour se recentrer sur ce qui fait sa valeur ajoutée. Pas besoin d’être bac + 10 pour détecter des pieds plats mais – en dehors des sages-femmes, qui sont un très bon exemple – il n’y a rien entre l’infirmier à bac +3 et le médecin. La réorganisation du système découlera de ces nouveaux métiers : il faudra revoir la rémunération à l’acte, faute de quoi les médecins diront « on nous ôte le pain de la bouche », modifier toute la formation initiale pour apprendre le travail en équipe, etc.
Commentaire:
J'aurai plutôt annoncé la fin du médecin et du chirurgien. La chirurgie est devenue une industrie de l'implantation de dispositifs et demain d'organes concus in vitro que des proctors techniciens robotisés bien formés ou programmés pourront implanter de manière parfaitement répétitive fiable et automatisée.
Réorganisation est un mot probablement inexact. L'innovation organisationnelle qui suppose que les acteurs soient libres d'innover est un concept plus approprié.
Réorganisation est un mot probablement inexact. L'innovation organisationnelle qui suppose que les acteurs soient libres d'innover est un concept plus approprié.
Avec la « média-médecine » dont vous prophétisez l’avènement, que devient le « colloque singulier » médecin/patient ?
Cette relation privilégiée n’est pas supprimée, au contraire, elle sera renforcée parce que recentrée sur l’essentiel : le rôle du médecin, qui est de transgresser les codes. Quelque 10 % à 15 % des patients, pour des raisons familiales, personnelles, professionnelles, sociales, culturelles ou religieuses, disent : « Il me faut une prise en charge différente. » On est bien obligé d’en tenir compte ; à moi, médecin, de prendre la responsabilité de sortir du système. Cela nécessite une dépénalisation de l’erreur médicale, à conjuguer avec une rapide indemnisation des accidents.
Commentaire:
Il n'est pas nécessaire de dépénaliser il suffit de mieux contractualiser. Et pour cela il faut un accès au droit non pas par la soi disant démocratie sanitaire qui a institué une indemnisation low cost mais par des procédures civiles plus rapides et où le financement peut être apporté par un tiers.
D’où vient votre foi absolue dans le progrès scientifique ?
Je suis un de ceux qui considèrent que les progrès scientifiques servent l’humanité. Mais je ne suis pas dans la foi, je parle avec mon expérience. Je suis d’une génération qui a vécu en quarante ans une révolution, notamment une progression exceptionnelle dans l’efficacité des techniques opératoires. Aujourd’hui, quand on évoque l’innovation scientifique et médicale, on ne parle que des drames. Quand on lance un nouveau médicament, on en mesure le rapport « bénéfices/risques » ; ces mots sont mal compris par le malade qui se dit « moi, je prends tous les risques et l’industrie empoche tous les bénéfices ». Mieux vaudrait parler du rapport « avantages/inconvénients ».
Commentaire:
La foi est issue d'une croyance et la science est l'inverse d'une croyance. Cette question donne bien le ton des croyances journalistiques car on n'enseigne pas Popper en France. Il faut énoncer les faits par les mots qui les définissent et bénéfices/risques est très approprié. Un langage de novlangue bisounours aggrave l'incompréhension et le refus de la responsabilité de comprendre. Quand on perd un membre ou qu'on meurt ce n'est pas un inconvénient.
Pourquoi nous focalisons nous sur les fabricants de prothèses mammaires véreux ou les rares accidents de vaccination ?
Nous n’avons plus de mémoire. C’est pourquoi je rappelle dans ce livre l’augmentation continue de l’espérance de vie, l’éradication d’épidémies encore ravageuses il y a quelques décennies, la lutte contre la douleur… Nous sommes à un stade de cocooning qui nous rend faibles, avachis, incapables de prendre des risques. On est mal parce qu’on a tout !
Commentaire:
En réalité c'est inexact nous n'avons pas tout. Il nous manque surtout dans les pays à très fort état providence deux conditions de la vie et du bonheur: la liberté et la responsabilité. Oui ces deux valeurs absentes on s'affaiblit.
Vous menez la charge contre l’« intégrisme écolâtre », la « phobie du risque », les « comités citoyens autoproclamés démocratiques » aux mains de « spécialistes de la panique » Avez-vous voulu écrire un livre politique ?
Qu’on le veuille ou non, ce sont l’Europe et l’Amérique du Nord – le capitalisme, donc – qui nous ont permis de gagner tant d’années de longévité. La mouvance anticapitaliste dure s’est parée des oripeaux de l’écologie. C’est extrêmement pernicieux, car ces sectes-là sont très organisées, capables de déstabiliser les populations avec des actions coups-de-poing médiatisées. Et les scientifiques, les politiques sont tétanisés devant ces outrances. Tout débat est impossible, car ces acteurs refusent les bases sur lesquelles s’appuie la vérité scientifique, répondent « ça, c’est vous qui le dites ». L’a priori politique est patent, sous couvert d’un retour à la nature, et il est mortifère. Mon livre est donc politique s’il permet de « dépolluer » en remettant les choses en perspective : « Regardez d’où nous venons et où nous en sommes, pour voir où nous voulons aller ensemble ».
Commentaire:
Excellent, en effet le relativisme pour contester la science suspectée d'être capitaliste et bourgeoise et le totalitarisme quand il s'agit de discuter climat, OGM ou alimentation sont les deux mamelles du gauchisme écologique.
Le progrès scientifique est-il toujours utile ? Certains parlent par exemple de « surdiagnostic » ou de « surdépistage » de maladies…
La science amène toujours une meilleure compréhension de la planète et de l’homme. C’est l’utilisation de ces connaissances qui peut s’accompagner d’effets nocifs. Il n’y a pas de surdiagnostic du cancer de la prostate : cela ne pose aucun problème que des hommes qui, à une autre époque, l’auraient ignoré, sachent qu’ils en sont atteints. La vraie question est celle d’une éventuelle suraction qui peut conduire à infliger des traitements lourds à des hommes âgés, dont le cancer évolue lentement, et qui mourront d’autre chose bien avant. Faisons attention aux mots si nous voulons lancer les bonnes réformes. Notre « système de soins » est trop centré sur l’hôpital. Si on réfléchissait plutôt à l’avenir de notre « système de santé », la priorité irait à la prévention, à la surveillance, au dépistage, et l’hôpital serait l’erreur, le point d’arrivée quand on est en échec sur tout ce qui précède.
Commentaire:
Il n'y a pas de surdiagnostic il y a seulement des traitements inappropriés au rapport bénéfice/risque ou bien des rapports B/R inconnus. Par exemple on parle de la prostate pour les cancers diagnostiqués mais qui en réalité n'auront pas d'impact sur la survie mais on ne parle jamais du dépistage du cancer du sein:
"A systematic assessment based on all of the evidence available from 1960-2014 showed that for 10,000 women in their 50s, who are screened annually over the course of a decade, there are only 5 individuals whose breast cancer deaths are prevented. But there are over 6100 women who have false-positive tests that lead to additional imaging and unnecessary biopsy procedures. This > 60% false-positive rate is an indicator of a remarkably poor test with respect to accuracy, no less the large toll of emotional turmoil that it engenders."
E Topol
http://www.medscape.com/viewarticle/844153Il n'y a pas de surdiagnostic il y a seulement des traitements inappropriés au rapport bénéfice/risque ou bien des rapports B/R inconnus. Par exemple on parle de la prostate pour les cancers diagnostiqués mais qui en réalité n'auront pas d'impact sur la survie mais on ne parle jamais du dépistage du cancer du sein:
"A systematic assessment based on all of the evidence available from 1960-2014 showed that for 10,000 women in their 50s, who are screened annually over the course of a decade, there are only 5 individuals whose breast cancer deaths are prevented. But there are over 6100 women who have false-positive tests that lead to additional imaging and unnecessary biopsy procedures. This > 60% false-positive rate is an indicator of a remarkably poor test with respect to accuracy, no less the large toll of emotional turmoil that it engenders."
E Topol
Le système de soins n'est pas le système de santé car il n'y a pas de système de santé. Il s'agit d'un abus de langage qui en dit long sur la volonté de caser à tout prix le mot santé au lieu de maladie. Nous souscrivons une assurance maladie et une complémentaire maladie pas santé.
Vos détracteurs, y compris parmi vos confrères, vous reprochent vos liens avec « big pharma ». Vous revendiquez cette collaboration avec l’industrie du médicament. Est-ce pour le plaisir de la provocation ?
Je me fiche de ces critiques. Si je le pouvais, j’irais sur les plateaux télé bardé d’autocollants Sanofi et Merck ! Comment l’industrie de la santé pourrait-elle avancer sans les médecins et comment les médecins pourraient-ils avancer sans l’industrie ? Nous sommes tous liés à quelque chose, soit financièrement, soit personnellement, soit intellectuellement, soit religieusement. Le problème survient quand, de ces liens, on passe au conflit d’intérêts, c’est-à-dire au moment où nous sommes dominés par celui qui vous fascine ou qui vous paye – et la subornation intellectuelle est souvent bien pire que la subornation financière. A ce moment-là, on peut toujours démissionner, je l’ai fait deux fois. La solution, c’est la transparence et elle devrait s’appliquer à toutes les professions. Tous mes liens d’intérêts figurent sur mon site Internet, je vais y ajouter les montants que je gagne pour chaque collaboration, et je suis favorable à l’amendement à la loi Touraine voté en ce sens. Je ne nie pas non plus les cas où certains se sont laissés aller à la corruption : chargeons un gendarme de vérifier l’honnêteté de chacun et dégageons avec violence ceux qui ont triché !
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La vraie question c'est celle de la nomination à vie des fonctionnaires quels qu'ils soient pas celle des liens avec big pharma. Avec des personnes qui font carrière à la même place les jeunes ne peuvent apporter de changement au moment de leur vie où ils sont les plus productifs et des situations de rente et de connivence se pérennisent. La deuxième question liée à la première c'est celle de l'open data et de la transparence des contrats.
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La vraie question c'est celle de la nomination à vie des fonctionnaires quels qu'ils soient pas celle des liens avec big pharma. Avec des personnes qui font carrière à la même place les jeunes ne peuvent apporter de changement au moment de leur vie où ils sont les plus productifs et des situations de rente et de connivence se pérennisent. La deuxième question liée à la première c'est celle de l'open data et de la transparence des contrats.
Vous « allumez » aussi ceux qui s’en prennent aux cliniques privées ou qui font des bonds quand on parle d’hôpital-entreprise. Au fond, c’est l’idée qu’il ne faut pas « faire de l’argent sur le dos des malades » qui vous hérisse…
C’est une vision malsaine alors que des millions de gens sont sauvés chaque année en prenant des médicaments ou en se faisant opérer dans une clinique privée. C’est de l’égalitarisme franchouillard : on a coupé la tête du roi, on est passé de sujet à citoyen et depuis on ne supporte pas que le voisin ait plus que soi. Les Anglo-Saxons n’ont pas ce même rapport avec l’argent. Nous sommes un pays catholique où faire fructifier un bien, c’est mal ; le drame de la France, c’est la révocation de l’Edit de Nantes et le départ des protestants ! Quant à l’hôpital-entreprise, nous sommes dans une économie de marché : que ceux qui n’en veulent pas aillent en Corée du Nord ou en Birmanie voir si on y vit mieux…
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L'hôpital est une entreprise publique de services. L'hôpital produit des soins et heureusement. La question simple est de savoir si une entreprise publique peut être en déficit chronique. Avec une autonomie totale et une comptabilité normale les hôpitausx iraient mieux et délivreraient des soins de meilleure qualité.
Vous soulignez le hiatus entre liberté individuelle et bien-être personnel, d’une part, et politique de santé publique d’autre part. Que pensez-vous de l’article 1 de la loi Touraine qui instaure un « droit à la protection de la santé de chacun » ?
Un de mes livres précédents s’appelait Le droit à la santé n’existe pas. Seul existe le devoir pour une nation de prendre en charge ses citoyens. Si la cigarette est pour une personne un moyen de s’extraire de ses angoisses, arrêtons de vouloir l’en empêcher à tout prix – et de lui faire avaler à la place des médicaments ! Veut-on une société entièrement normalisée ? Le bonheur individuel n’est pas forcément rationnel ni en lien avec la norme sociétale. A la limite, pourquoi pas exiger des fumeurs une surcotisation. Mais avec 80% de taxes sur le paquet de cigarettes, ils paient déjà largement leurs soins.
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Excellent. Ce droit n'existe que dans la loi mais pas dans la réalité. C'est un faux droit qui fait partie des faux droits que les collectivistes accordent aux citoyens pour les convaincre de voter pour eux. Il n'y a rien dans ce droit qui permette la protection de la santé. Au contraire l'état au lieu de faux droits devrait s'efforcer d'agir réellement pour la santé des citoyens. Ce droit sera-t-il opposable aux aides qui durent depuis des décennies sur le diesel? Aux aides agricoles qui permettent d'acheter des pesticides? La santé est d'abord un capital personnel que l'on peut dilapider par son mode de vie ou au contraire entretenir par une vie saine. La santé collective est essentiellement celle liée à l'environnement et de ce point de vue c'est l'innovation et la science qui font avancer les choses sur des bases réelles et non pas les ayatollahs verts.
Excellent. Ce droit n'existe que dans la loi mais pas dans la réalité. C'est un faux droit qui fait partie des faux droits que les collectivistes accordent aux citoyens pour les convaincre de voter pour eux. Il n'y a rien dans ce droit qui permette la protection de la santé. Au contraire l'état au lieu de faux droits devrait s'efforcer d'agir réellement pour la santé des citoyens. Ce droit sera-t-il opposable aux aides qui durent depuis des décennies sur le diesel? Aux aides agricoles qui permettent d'acheter des pesticides? La santé est d'abord un capital personnel que l'on peut dilapider par son mode de vie ou au contraire entretenir par une vie saine. La santé collective est essentiellement celle liée à l'environnement et de ce point de vue c'est l'innovation et la science qui font avancer les choses sur des bases réelles et non pas les ayatollahs verts.
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