EXCLUSIF - La note alarmiste adressée aux cliniques et hôpitaux privés
« Le Point » s'est procuré un message envoyé aux cliniques d'Île-de-France. Un véritable appel à l'aide, alors que l'épidémie n'est pas encore à son pic.
Par François Malye, Jérôme Vincent
Un signe de plus que, depuis hier, l'urgence est absolue en région parisienne pour faire face à la vague du coronavirus. Et qu'une tension extrême habite ses responsables sanitaires. L'Agence régionale de santé (ARS) d'Île-de-France exhorte les cliniques de la région à passer la cinquième vitesse et à ouvrir 300 lits de réanimation. Dans un courrier adressé hier aux établissements privés à but commercial, l'un des directeurs de cette agence de l'État supplie les dirigeants des groupes de l'hospitalisation privée de mettre tous leurs moyens au secours de l'épidémie.
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« Vous avez compris qu'on doit passer à la vitesse très, très supérieure […]. Vous devez vous fixer des objectifs plus qu'ambitieux. » Et il rentre dans le détail, par exemple pour Ramsay (le groupe Ramsay, le plus important de France dans ce secteur, compte 31 cliniques en région francilienne, NDLR), l'ARS pense à 150 lits de réanimation Covid en plus sous 48 heures ; pour le groupe Ambroise-Paré (4 cliniques, Ambroise-Paré, Hartmann, Pierre Cherest à Neuilly-sur-Seine, Bizet à Paris, NDLR), à 30 lits de réanimation dédiés ; pour le groupe Almaviva (une dizaine de cliniques dans la région, NDLR), à 90 lits de réanimation Covid+ ; enfin, pour le groupe Vivalto (10 cliniques en Île-de-France, NDLR), à 70 places.
« Si on prend 150 malades par jour, à la fin de la semaine le système est cuit »
« Je vois bien les échanges de-ci de-là pour ouvrir 6 lits, 5 lits, mais ce n'est plus l'exercice. Je pense que là où vous avez de la réanimation, et bien vous triplez, vous quadruplez ; vous mettez des malades dans les blocs, etc. J'insiste mais là, à l'heure où je vous parle, 1 100 malades sont en réanimation ; si on prend 150 malades par jour, à la fin de la semaine le système est cuit ; et nous n'aurons aucune aide de personne ».
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En gros, schématise l'ARS, « il faut trouver 1 000 lits de plus [pour l'instant]. Le privé en apporte un bon tiers, l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris, un tiers, les autres [les établissements privés à but non lucratif, comme les centres anticancéreux, l'hôpital Foch à Suresnes, les hôpitaux mutualistes, l'hôpital Saint-Joseph à Paris, etc., NDLR] un dernier tiers ».
« Nous ne sommes plus dans le respect des normes »
En outre, ce message de l'ARS destiné à rester confidentiel contient très explicitement l'aveu d'un abaissement possible de la qualité des soins à venir dans la prise en charge de patients contaminés par le coronavirus. « Vous allez rencontrer tous les plus beaux discours pour dire que ce n'est pas possible, mais ça va devoir l'être ; nous ne sommes plus dans le respect des normes ou de quoi que ce soit ; les chirurgiens, les anesthésistes, les infectiologues, etc., tout le monde doit s'y mettre ; et ne croyons pas qu'ils seront tous des as de la réanimation en 24 heures, ce n'est pas vrai, et il faudra faire avec. » Un motif d'inquiétude supplémentaire…
Publié le 26/03/2020 à 15:32
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