samedi 5 mai 2018

Some truths about leftists and why they don't deserve respect: the Fillon trial, a state affair illustrating the ties between leftists judges and Élysée palace

FIGAROVOX.- Un an après l'élimination de François Fillon au second tour de la présidentielle, l'affaire semble au point mort. Comment expliquez-vous cette lenteur après la rapidité de sa mise en examen?
Hervé LEHMAN.- Le rythme actuel de la procédure visant François Fillon est normal, c'est-à-dire conforme à la durée habituelle des procédures d'instruction. Ce qui est stupéfiant, c'est la rapidité avec laquelle l'affaire a été traitée au début, comme si on avait voulu éliminer le principal candidat de l'opposition. Comme il était procéduralement impossible de faire comparaitre François Fillon devant un tribunal dans les quelques mois de l'élection présidentielle, on a choisi d'ouvrir une instruction qui permettait sa mise en examen, cette pré-condamnation des présumés innocents.
À peine l'instruction ouverte, les juges d'instruction ont été désignés; à peine désignés ils ont convoqué, après avoir étudié le dossier pendant le week-end, François et Penelope Fillon pour les mettre en examen. Où était l'urgence? L'affaire remontait à plusieurs années… Certains disent: oui, mais si François Fillon avait été élu, il aurait bénéficié de l'immunité présidentielle pendant son quinquennat et l'affaire aurait été bloquée. Si c'est bien le raisonnement suivi par les juges, cela signifierait qu'ils avaient conscience que la mise en examen allait empêcher François Fillon d'être élu. C'est cette interférence du judiciaire dans le processus électoral qui pose un problème.
L'ancien directeur du FBI, James Comey, vient d'écrire dans son livre qu'il avait eu conscience de nuire à la campagne d'Hillary Clinton en relançant publiquement son enquête quelques jours avant l'élection. Les magistrats en charge de l'affaire Fillon ont-ils pu ne pas avoir conscience qu'ils interféraient dans le rendez-vous démocratique majeur qu'est l'élection présidentielle? (quelle prudence, évidemment ils savaient qu'ils interféraient et on peut affirmer que la probabailité est grande qu'ils l'ai fait sciemment puisque FF était favori mais opposé à leur agenda politique NDA).
Le Parquet national financier était-il légitime dans cette affaire?
Le parquet national financier a été créé pour lutter contre «la grande délinquance financière». La loi lui donne compétence pour les affaires de détournement de fonds publics «d'une grande complexité». L'affaire de l'emploi de Penelope Fillon est d'une grande simplicité. On n'a pas créé un parquet national financier pour vérifier l'emploi du temps d'une assistante parlementaire de la Sarthe. Si le parquet national financier s'est saisi, précipitamment (le jour même de la sortie de l'article du Canard enchaîné), en raison de la dimension politique de l'affaire, alors ce n'est plus un parquet national financier, mais un parquet national politique.
Cette saisine est d'autant moins compréhensible que, pour les affaires apparues à la même époque, la soirée à Las Vegas d'Emmanuel Macron organisée par Business France qui était dirigée par Muriel Penicaud, l'affaire des assistants parlementaires du Modem de François Bayrou, l'affaire mettant en cause Richard Ferrand, le parquet national financier ne s'est pas saisi, alors même que les deux premières sont plus complexes que le cas de Penelope Fillon.

Ce n'est plus un parquet national financier, mais un parquet national politique.

Il n'y a pas d'explication officielle satisfaisante à ce mystère. Interrogé par La Voix du Nord, le procureur de la République financier a répondu: «je n'ai pas de sens politique».
François Fillon n'a-t-il pas lui-même commis un certain nombre d'erreurs? À commencer par se mettre entre les mains des juges…
Il est évidemment plus facile de commenter après coup, que d'agir dans la tourmente. Mais il est certain que François Fillon a sous-estimé la virulence de l'offensive judiciaire dont il faisait l'objet. Pour qui avait analysé les conditions de la création du parquet national financier et la fermeté de son action dans les affaires mettant en cause la droite, en particulier Nicolas Sarkozy et son entourage, il était évident que ce parquet créé par François Hollande ne se saisissait pas de cette affaire avec une extrême rapidité dans le but de blanchir François Fillon avant l'élection présidentielle. En proclamant dans un premier temps qu'il lui faisait confiance, François Fillon a fait preuve de naïveté.
Il en a été de même lorsqu'il a déclaré qu'il se retirerait de l'élection présidentielle s'il était mis en examen, parce qu'il était convaincu, à tort, que ce n'était techniquement pas possible. On pourrait dire qu'il a alors donné le mode d'emploi à ses adversaires judiciaires.
Après avoir sous-estimé l'offensive judiciaire, François Fillon a surjoué, tardivement, l'indignation en criant au complot et au cabinet noir. Ce n'était plus audible, après ce qu'il avait précédemment dit.
L'ancien Premier ministre a évoqué un cabinet noir. Croyez-vous à cette théorie du complot?
Il n'y a pas de cabinet noir, et pas de complot. Les choses sont plus subtiles que cela. Il y a une chaîne de magistrats, dont la plupart ont été nommés par François Hollande et Christiane Taubira, dont plusieurs ont été aux cabinets de Lionel Jospin ou de Ségolène Royal, dont certains ont été militants ou sont proches du Syndicat de la magistrature. Évidemment, ces magistrats n'ont pas une sensibilité proche de François Fillon ou de Sens commun. Ils ont agi selon leur conscience et leurs convictions.
Comment le juge d'instruction est-il nommé?
Lorsque le juge Tournaire a été désigné comme juge d'instruction principal, la presse a dit: c'est «le juge de fer, François Fillon va passer un sale moment». Mais personne ne s'est interrogé sur la raison pour laquelle c'est ce juge qui s'est trouvé en charge de l'affaire Fillon. Le juge d'instruction n'est pas tiré au sort, il est désigné par le président du tribunal de grande instance. Évidemment, la désignation ne se fait pas au hasard ; elle ne se fait pas non plus sur des critères objectifs et pré-établis. Elle résulte d'un choix non justifié et non motivé.
Il doit donc être constaté qu'a été choisi pour l'affaire mettant en cause le candidat de l'opposition à l'élection présidentielle un juge qui est réputé pour traiter les politiques comme les délinquants de droit commun, qui était déjà en charge d'affaires mettant en cause Nicolas Sarkozy, qu'il a mis sur écoutes téléphoniques pendant huit mois et qu'il vient alors de renvoyer devant le tribunal correctionnel pour l'affaire Bygmalion contre l'avis de son collègue co-saisi. Le même juge qui mettra en garde à vue Nicolas Sarkozy, ancien président de la République, en mars dernier, puis Vincent Bolloré en avril. Ici encore, faut-il croire que le choix a été fait en l'absence de tout «sens politique»?
Diriez-vous comme Napoléon Ier que «le juge d'instruction est l'homme le plus puissant de France»?
La procédure d'instruction est archaïque. Elle est très lourde, très lente, et dépend entièrement de la qualité du juge d'instruction saisi.

Le mis en examen est juridiquement présumé innocent, il est médiatiquement et socialement présumé coupable.

Nos grands voisins, l'Allemagne et l'Italie, y ont renoncé ; la plupart des pays démocratiques n'ont pas de juge d'instruction et ont un système clair dans lequel, entre le procureur qui enquête et accuse et la défense, il y a un juge qui ne fait que juger. Comme le dit Robert Badinter, le juge d'instruction est mi-Maigret mi-Salomon, mi-policier mi-juge. C'est une fonction schizophrénique.
La commission Delmas-Marty, mise en place par François Mitterrand et la commission Léger, désignée par Nicolas Sarkozy, de sensibilités différentes et à vingt ans d'écart, sont arrivées à la même conclusion: il faut abandonner la procédure d'instruction. Mais c'est un tabou: dès qu'un projet voit le jour, les conservatismes, notamment syndicaux, crient à la mort de la démocratie et le projet est enterré pour vingt ans. Le prétexte est que le parquet n'est pas indépendant et qu'il pourrait manipuler les affaires politiques. Pour 1 % des affaires, dites politiquement sensibles, on maintient un système qui marche mal pour les autres 99 %. Surtout, il est possible de mettre en place des garde-fous pour les affaires politiques. Et on voit avec l'affaire Fillon que l'existence du juge d'instruction n'est pas une garantie contre des dérives dans les affaires politiques.
Si l'on maintient la procédure d'instruction, il faut à tout le moins supprimer la mise en examen qui est un fléau judiciaire. Le mis en examen est juridiquement présumé innocent, il est médiatiquement et socialement présumé coupable. Chaque année, environ dix mille personnes mises en examen sont finalement déclarées innocentes, mais restent aux yeux de tous suspectes parce que le sceau d'infamie de la mise en examen est indélébile. Techniquement, la mise en examen n'est pas nécessaire ; pour les mis en examen qui seront reconnus innocents des années plus tard, elle produit des effets catastrophiques.
Dans votre livre, vous rappelez que le syndicat de magistrature, à l'origine du mur des cons, est né en 1968 et que son texte fondateur est la harangue de Baudot: que cela signifie-t-il?
Oui, c'est cette harangue en effet, qui proclame: «Soyez partiaux… Ayez un préjugé favorable pour la femme contre le mari, pour l'enfant contre le père, pour le débiteur contre le créancier, pour l'ouvrier contre le patron, pour l'écrasé contre la compagnie d'assurances de l'écraseur, pour le malade contre la sécurité sociale, pour le voleur contre la police, pour le plaideur contre la justice».
«Soyez partiaux», c'est une injonction terrible parce que c'est l'opposé même de la notion de justice, le contraire du droit à un tribunal impartial affirmé par la Convention européenne des droits de l'homme. Lorsque l'on entend dire que la harangue de Baudot est un texte ancien, qui remonte à plus de quarante ans et serait «prescrit», on doit bien constater qu'il a gardé un écho chez certains magistrats, heureusement fort minoritaires. Qui trouvait-on sur le mur des cons affiché crânement au siège du Syndicat de la magistrature et «enrichi» au fur et à mesure par les magistrats qui s'y rendaient? Des politiciens de droite, bien sûr, mais aussi deux pères de jeunes filles violées et assassinées. Les cons, ce sont les victimes!

L'immense majorité des magistrats sont impartiaux et insensibles aux influences politiques. Une minorité reste dans l'esprit de la harangue de Baudot. Il vaut mieux ne pas passer devant eux quand on est un politicien de droite ou un chef d'entreprise.



Pour maintenir la balance entre le fort et le faible, le riche et le pauvre, soyez partiaux ! ...

par Oswald Baudot, substitut du procureur de la République de Marseille, en 1974.



Vous voilà installés et chapitrés. Permettez-moi de vous haranguer à mon tour, afin de corriger quelques-unes des choses qui vous ont été dites et de vous en faire entendre d’inédites.

En entrant dans la magistrature, vous êtes devenus des fonctionnaires d’un rang modeste. Gardez-vous de vous griser de l’honneur, feint ou réel, qu’on vous témoigne. Ne vous haussez pas du col. Ne vous gargarisez pas des mots de " troisième pouvoir "de " peuple français ", de " gardien des libertés publiques ", etc. On vous a dotés d’un pouvoir médiocre : celui de mettre en prison. On ne vous le donne que parce qu’il est généralement inoffensif. Quand vous infligerez cinq ans de prison au voleur de bicyclette, vous ne dérangerez personne. Evitez d’abuser de ce pouvoir.

Ne croyez pas que vous serez d’autant plus considérables que vous serez plus terribles. Ne croyez pas que vous allez, nouveaux saints Georges, vaincre l’hydre de la délinquance par une répression impitoyable. Si la répression était efficace, il y a longtemps qu’elle aurait réussi. Si elle est inutile, comme je crois, n’entreprenez pas de faire carrière en vous payant la tête des autres. Ne comptez pas la prison par années ni par mois, mais par minutes et par secondes, tout comme si vous deviez la subir vous-mêmes.

Il est vrai que vous entrez dans une profession où l’on vous demandera souvent d’avoir du caractère mais où l’on entend seulement par là que vous soyez impitoyables aux misérables. Lâches envers leurs supérieurs, intransigeants envers leurs inférieurs, telle est l’ordinaire conduite des hommes. Tâchez d’éviter cet écueil. On rend la justice impunément : n’en abusez pas.

Dans vos fonctions, ne faites pas un cas exagéré de la loi et méprisez généralement les coutumes, les circulaires, les décrets et la jurisprudence. Il vous appartient d’être plus sages que la Cour de cassation, si l’occasion s’en présente. La justice n’est pas une vérité arrêtée en 1810. C’est une création perpétuelle. Elle sera ce que vous la ferez. N’attendez pas le feu vert du ministre ou du législateur ou des réformes, toujours envisagées. Réformez vous-mêmes. Consultez le bon sens, l’équité, l’amour du prochain plutôt que l’autorité ou la tradition.

La loi s’interprète. Elle dira ce que vous voulez qu’elle dise. Sans y changer un iota, on peut, avec les plus solides " attendus " du monde, donner raison à l’un ou à l’autre, acquitter ou condamner au maximum de la peine. Par conséquent, que la loi ne vous serve pas d’alibi.

D’ailleurs vous constaterez qu’au rebours des principes qu’elle affiche, la justice applique extensivement les lois répressives et restrictivement les lois libérales. Agissez tout au contraire. Respectez la règle du jeu lorsqu’elle vous bride. Soyez beaux joueurs, soyez généreux : ce sera une nouveauté !

Ne vous contentez pas de faire votre métier. Vous verrez vite que pour être un peu utile, vous devez sortir des sentiers battus. Tout ce que vous ferez de bien, vous le ferez en plus. Qu’on le veuille ou non, vous avez un rôle social à jouer. Vous êtes des assistantes sociales. Vous ne décidez pas que sur le papier. Vous tranchez dans le vif. Ne fermez pas vos coeurs à la souffrance ni vos oreilles aux cris.

Ne soyez pas de ces juges soliveaux qui attendent que viennent à eux les petits procès. Ne soyez pas des arbitres indifférents au-dessus de la mêlée. Que votre porte soit ouverte à tous. Il y a des tâches plus utiles que de chasser ce papillon, la vérité, ou que de cultiver cette orchidée, la science juridique.

Ne soyez pas victime de vos préjugés de classe, religieux, politiques ou moraux. Ne croyez pas que la société soit intangible, l’inégalité et l’injustice inévitable, la raison et la volonté humaine incapables d’y rien changer.

Ne croyez pas qu’un homme soit coupable d’être ce qu’il est ni qu’il ne dépende que de lui d’être autrement. Autrement dit, ne le jugez pas. Ne condamnez pas l’alcoolique. L’alcoolisme, que la médecine ne sait pas guérir, n’est pas une excuse légale mais c’est une circonstance atténuante. Parce que vous êtes instruits, ne méprisez pas l’illettré. Ne jetez pas la pierre à la paresse, vous qui ne travaillez pas de vos mains. Soyez indulgents au reste des hommes. N’ajoutez pas à leurs souffrances. Ne soyez pas de ceux qui augmentent la somme des souffrances.

Soyez partiaux. Pour maintenir la balance entre le fort et le faible, le riche et le pauvre, qui ne pèsent pas d’un même poids, il faut que vous la fassiez un peu pencher d’un côté. C’est la tradition capétienne. Examinez toujours où sont le fort et le faible, qui ne se confondent pas nécessairement avec le délinquant et sa victime. Ayez un préjugé favorable pour la femme contre le mari, pour l’enfant contre le père, pour le débiteur contre le créancier, pour l’ouvrier contre le patron, pour l’écrasé contre la compagnie d’assurance de l’écraseur, pour le malade contre la sécurité sociale, pour le voleur contre la police, pour le plaideur contre la justice.

Ayez un dernier mérite : pardonnez ce sermon sur la montagne à

votre collègue dévoué.

Oswald Baudot
[1]



Notes


[1] Oswald Baudot (1926 - 1994) a été une des figures du Syndicat de la magistrature.

Cet éternel révolté qui aimait bousculer l’institution judiciaire est resté dans l’histoire de la magistrature pour cette " harangue " rédigée en 1974, alors qu’il était substitut du procureur de la République de Marseille. Le garde des sceaux de l’époque, Jean Lecanuet, n’avait guère apprécié cette vision de la magistrature : accusé de manquement à l’obligation de réserve, Oswald Baudot avait comparu, le 28 janvier 1975, devant la commission de discipline du parquet, qui avait recommandé au ministre une réprimande avec inscription au dossier. Face à la mobilisation du Syndicat de la magistrature et au soutien de l’Union syndicale des magistrats, le garde des sceaux avait finalement renoncé à sanctionner l’impertinent.

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