Réforme du système de santé français : rétablir l'efficience médicale et financière
I. Contexte général
Le système de santé français n’est pas confronté à une crise de moyens mais à une dérive de l’allocation des ressources.
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La France consacre déjà 12,3 % de son PIB à la santé, l’un des niveaux les plus élevés d’Europe.
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Les dépenses hospitalières publiques absorbent plus de 50 % de la consommation de soins et biens médicaux (CSBM).
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Les déterminants de la dépense ne sont plus d’abord liés à l’accès aux soins, mais à des dynamiques internes de sur-administration, sur-médicalisation et dispersion des priorités médicales.
Toute réforme crédible doit viser un double objectif :
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Restaurer l’efficience médicale.
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Assurer la soutenabilité financière à moyen et long terme.
II. Trois impensés critiques dans le diagnostic actuel
1️⃣ Blocage interne de la masse salariale hospitalière publique
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70 % à 75 % des dépenses de fonctionnement des hôpitaux publics sont absorbées par la masse salariale.
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Les personnels soignants (infirmiers notamment) sont sous-rémunérés (21ᵉ rang OCDE), mais l’essentiel des marges salariales est accaparé par des fonctions administratives et médico-techniques.
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Cette structure bloque toute revalorisation salariale significative sans réforme interne des effectifs supports.
2️⃣ Extension incontrôlée des prises en charge de maladies chroniques stabilisées
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Le système rembourse indifféremment :
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les états instables qui nécessitent des soins soutenus ;
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et les états stabilisés qui pourraient relever d’une surveillance médicale allégée.
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Cette absence de tri médical favorise une croissance mécanique et autonome des dépenses de soins chroniques.
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Les coûts de nouvelles thérapeutiques chroniques s’ajoutent sans contrôle médico-économique systématique.
3️⃣ Sur-médicalisation inefficace des addictions et des conduites sociales à risque
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Les expériences internationales (Portugal, Suisse, Islande) montrent qu’une stratégie combinant responsabilisation sociale, action judiciaire et dispositifs médico-sociaux ciblés permet :
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de réduire massivement les décès par overdose (Portugal : de 80 à 6/million d’hab.),
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de stabiliser les usages problématiques (Suisse : décès divisés par 5),
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de faire chuter les usages précoces chez les jeunes (Islande : alcool 42 % → 5 % ; tabac 23 % → 3 %).
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En France :
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doublement des usages réguliers de cannabis chez les jeunes (10 % → 21 % en 20 ans),
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augmentation des décès par overdose (5 → 13/million d’hab.),
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maintien de plus de 6 000 points de deal actifs.
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Des dépenses publiques considérables (20-25 Mds €/an) ne produisent aucun retournement épidémiologique significatif.
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III. Principes de la réforme proposée
A. Rétablir la hiérarchie des priorités médicales
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Reconcentrer le système sur les situations médicales réellement instables ou complexes.
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Démédicaliser les suivis stabilisés des maladies chroniques.
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Limiter la prévention médicale aux actes disposant d’un bénéfice sanitaire démontré.
B. Réallouer la masse salariale hospitalière
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Audit et réduction progressive des effectifs administratifs et médico-techniques.
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Réinvestissement des marges dégagées dans la revalorisation des soignants directs.
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Organisation souple des carrières et temps de travail pour fidéliser les soignants.
C. Démédicaliser partiellement les politiques d’addictions
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Sortir du tout-médical et tout-social : restaurer une politique équilibrée intégrant pleinement :
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la sanction des réseaux criminels,
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la responsabilisation des familles et des jeunes,
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des dispositifs éducatifs et sociaux précoces.
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D. Gouvernance et transparence
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Séparer clairement les organismes de régulation qualité des gestionnaires hospitaliers pour lever les conflits d’intérêts actuels.
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Rendre publiques les données brutes de qualité des soins (ex. infections nosocomiales réelles).
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Restaurer un pilotage parlementaire du périmètre remboursable et des grands arbitrages médico-économiques.
IV. Objectif final
Ni restriction aveugle, ni démagogie dépensière : une réforme de santé politiquement stable repose sur :
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un recentrage clinique strict,
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une gouvernance responsable,
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une transparence complète des résultats sanitaires réels.