lundi 13 février 2017

Rendre les mutuelles obligatoires c'est leur rendre un sacré service !

Les complémentaires santé n'assurent pas tant que ça



Frais de gestion démesurés, tarifs trop élevés et remboursements à la baisse : les assurés sont de plus en plus pénalisés par les pratiques commerciales des complémentaires santé.

LE FAIT DU JOUR. Les mauvaises surprises pleuvent pour les assurés, aggravées par les nouveaux contrats responsables.

Elles sont incontournables dans le système de santé : 96 % de la population en a une. Pourtant, les complémentaires santé réservent aussi de bien mauvaises surprises. Le marché est juteux : plus de 33 Mds€ par an pour les assureurs privés, mutuelles et institutions de prévoyance, mais dont les Français ne perçoivent en retour que 26 Mds€, du fait de frais de gestion parfois astronomiques (jusqu'à 28 %, selon la Cour des comptes). Un marché qui vient encore de grossir, stimulé par la loi ANI imposant aux entreprises privées de proposer, depuis le 1er janvier, une couverture complémentaire à chaque salarié.

3 Mds€ d'aides de l'Etat

Quatre-vingt-quinze pour cent des contrats en cours sont labellisés « responsables » et bénéficient à ce titre d'importants avantages fiscaux. Un manque à gagner pour l'Etat proche de 3 Mds€ par an. En contrepartie, les complémentaires s'engagent sur des planchers de remboursement. Afin d'améliorer l'accès aux soins, le ministère de la Santé a réformé l'an dernier les contrats responsables. Sauf que ces contrats (la quasi-totalité de ceux proposés) intègrent dorénavant des plafonds de prise en charge. Ces nouvelles conditions, les Français sont en train de les découvrir au moment des renouvellements des contrats qui courent jusqu'en 2017. Et c'est la douche froide.

Garanties en baisse...

Domicilié à Ciry-le-Noble, en Saône-et-Loire, Alain Bordet s'est étouffé à la lecture de son nouveau contrat Adréa. « Mes médicaments à 15 % ne sont plus pris en charge, ni la chambre individuelle ni la cure thermale. » Mauvaise surprise aussi pour Martine, de Clamart (Hauts-de-Seine), adhérente à la Mutuelle générale. Ses soins dentaires ne sont plus pris en charge à 300 % mais à 200 %, et les frais d'auxiliaires de santé à 100 % au lieu de 400 % du tarif Sécurité sociale. Ces deux cas sont loin d'être les seuls témoignages d'assurés pénalisés (lire en cliquant ici). Les remboursements sont désormais parfois si faibles que les complémentaires ont déjà trouvé la parade en commercialisant... des surcomplémentaires.
... tarifs en hausse
En revanche, les tarifs continuent d'augmenter : + 13,1 % depuis 2011, selon l'Insee. La Fédération nationale de la mutualité française (FNMF), qui fédère 425 mutuelles, avance le chiffre de 2,8 % en moyenne par an, soulignant que « ça n'a fait que suivre la progression des dépenses de santé et celle des taxes ». Peut-être. Mais le Centre technique des institutions de prévoyance, lui, a calculé que les nouvelles règles vont pousser les tarifs à bondir de 15 à 50 % dans certaines entreprises d'ici deux ans.
Les complémentaires... en bonne santé
En 2013, elles ont dégagé 223 M€ de profits. C'est peu, mais il faut y ajouter un trésor : les placements financiers et immobiliers. Selon un rapport de la Direction des statistiques du ministère de la Santé, publié en juin, la solvabilité moyenne des complémentaires est 3,6 fois supérieure à ce qu'exige la réglementation ! Mais, dans le détail, difficile d'en savoir plus. Car, si la réglementation prévoyait qu'elles publient leurs comptes à partir de 2012, la quasi-totalité des mutuelles cultivent toujours le secret sur leurs chiffres.


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Députés et... administrateurs de la Matmut

Depuis novembre, la Matmut compte au sein de son conseil d'administration... la députée PS de Seine-Maritime Valérie Fourneyron. Secrétaire d'Etat de Manuel Valls jusqu'en juin 2014, elle avait alors repris son siège à l'Assemblée nationale où le débat sur les complémentaires santé faisait rage. Certains dénoncent déjà un conflit d'intérêts puisque la parlementaire vote des textes qui s'appliquent directement à la Matmut, telle la loi Santé, en décembre, ou les lois annuelles de financement de la Sécurité sociale. 

Mais elle n'est pas la seule : un autre député, le radical de gauche Jacques Moignard, siège au conseil d'administration de la Matmut. Selon sa déclaration d'intérêt de janvier 2014, il perçoit 1 500 € par mois en échange de « son expertise », d'après la direction de la mutuelle. Une direction déjà épinglée par « le Canard enchaîné » selon lequel la quasi-totalité des membres du conseil d'administration ont pour voiture de fonction une Porsche Cayenne (prix de base 68 000 €). Le PDG, Daniel Havis, est rémunéré « 450 000 € par an », selon ses déclarations à « l'Express » en janvier 2014 (autant à l'époque qu'Henri Proglio, ex-patron d'EDF, entreprise du CAC 40).

Un autre risque de conflit d'intérêts plane sur la Fédération nationale de la mutualité française (FNMF) cette fois, qui défend les intérêts de 425 mutuelles. Président de la MGEN (n°2 de l'assurance santé), Thierry Baudet a annoncé sa candidature au poste de président de la Fédération... mais veut conserver son poste à la MGEN. Elu, il aurait accès à des informations confidentielles sur les concurrents de la MGEN. Mais il n'y a rien d'illégal : les statuts de la FNMF ont été modifiés l'an dernier pour le permettre...
  Le Parisien

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