Jupiter un essai de prévention primaire (patients n'ayant jamais fait d'accidents cardiovasculaires) avec les statines
La question est sérieuse, JUPITER (Justification for the Use of Statins in Primary Prevention: An Intervention Trial Evaluating Rosuvastatin trial) est un essai clinique qui avait pour but de mettre en évidence l'efficacité des statines (médicaments hypolipémiants) chez des patients dont le cholestérol des LDL est justement normal! Ridker, l'auteur de l'étude a poussé le bouchon plus loin que ne le permettait la théorie: excès de graisses dans le sang = plaque d'athérome = infarctus du myocarde ou du cerveau. En effet nombre de patients faisant un infarctus ont effectivement un cholestérol des LDL normal. Ceci est tout a fait exact et a été constaté depuis longtemps alors même que les tenants de la théorie paradigmatique du cholestérol privilégient les statistiques moyennes c'est à dire que sur une cohorte de patients, en moyenne le cholestérol des LDL est plus élevé que chez des patients n'ayant pas fait un accident cardiovasculaire. Cette approche moyenne cache en réalité un groupe important de patients malades dont le cholestérol des LDL est normal ou considéré comme tel. Il va sans dire que cette théorie fait peu de cas de personnes ayant un cholestérol des LDL élevé et qui ne feront pas d'accidents cardiovasculaires. La réponse stéréotypée selon laquelle c'est souvent parce qu'ils meurent d'une autre cause avant en particulier d'un cancer est bien évidemment un échappatoire car en réalité il existe de nombreux patients qui avec 1,6 g/l de cholestérol des LDL n'ont aucun athérome carotidien ni coronarien!
Oui mais alors sur quel critère a-t-on sélectionné les patients?
Sur l'existence d'une inflammation car depuis longtemps le même Paul Ridker et d'autres ont bien établi que l'athérome évolutif, celui qui va entraîner des accidents graves est un athérome inflammatoire! Autrement dit si vous avez un cholestérol des LDL normal mais une CRP (protéine de l'inflammation produite par le foie) élevée dans le sang, le risque de faire une rupture de plaque d'athérome au niveau des coronaires ou bien des carotides est élevé. Risque élevé dit possibilité de prévention. Mais aussi traitement de milliers de personnes pour rien... Il faut donc calculer le bénéfice/risque sur le plan médical et économique nous y reviendrons.
Inflammation, rupture de plaque et statines
Il est reconnu que l'accident coronarien, cérébral ou bien dans une autre artère de l'organisme qui survient en rapport avec une plaque d'athérome est lié à une accumulation de dépôts et surtout à la rupture de la plaque dont le contenu est exposé dans la lumière au flux sanguin. Cette rupture est provoquée par différents facteurs dont l'inflammation mais aussi une hémorragie dans la plaque conduisant à une augmentation brutale de pression, un accoup hypertensif, un contenu particulièrement liquide de la plaque...
Les statines abaissent le cholestérol des LDL et diminuent la mortalité et la morbidité cardiovasculaire en prévention secondaire c'est à dire chez les patients qui ont déjà fait un accident cardiovasculaire majeur. Ce point est très important, dès lors que le patient a fait un accident, il est certain qu'il est porteur d'une constellation de facteurs (acquis et génomiques) causaux de la maladie. Tel n'est pas le cas en prévention primaire puisque la sélection se faisant pour l'instant sur un facteur, il n'est pas du tout certain que ce facteur soit potentiellement causal chez ce patient en particulier.
L'athérome est défini comme une maladie plurifactorielle polygénique ce qui complique singulièrement l'approche préventive. Par ailleurs l'inflammation chronique est un concept très nouveau et encore très insuffisamment compris. Pourquoi ces patients ayant un cholestérol des LDL normal ont une CRP légèrement élevée? dans certains cas c'est facile: le fumeur par exemple est inflammatoire car l'inhalation de goudrons et autres produits de la cigarette brulée provoque une telle réaction. Pour le non fumeur c'est plus compliqué. Il est certain que des facteurs étrangers en clair des molécules ou bien des micro-organismes, provoquent cette inflammation chronique.
Lesquels?
Il est encore trop tôt pour le dire, même si certains nutriments sont déjà connus pour entraîner chez certaines personnes une inflammation par le biais d'une altération de la barrière intestinale, la muqueuse qui tapisse notre tube digestif.
Les résultats de JUPITER